10 questions sur les droits sociaux des travailleurs en Esat
La loi du 11 février 2005, qui a créé les établissements et services d’aide par le travail (Esat), a aussi introduit de nouveaux droits pour les travailleurs handicapés.
Quel est le statut des travailleurs accueillis en Esat ?
Créés par la loi n ° 2005102 du 11 février 2005, les établissements et services d’aide par le travail (Esat) ont remplacé les centres d’aide par le travail (CAT) à compter du 1er janvier 2007. Relevant du travail protégé et non du marché du travail, ils permettent aux personnes en situation de handicap qui ne peuvent pas travailler en milieu ordinaire d’exercer une activité à caractère professionnel et socialisante, tout en bénéficiant d’un suivi médicoéducatif.
L’Esat n’étant pas une entreprise, les travailleurs qui y sont accueillis sont considérés comme les usagers d’une structure sociale et médicosociale, et ne sont pas assimilables à des salariés de droit commun. Seules les dispositions du Code du travail concernant l’hygiène, la sécurité et la médecine du travail sont applicables à ces structures.
L’admission d’un travailleur en Esat ne procède pas d’un recrutement au sens propre du terme, mais d’une admission, après orientation par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Cette orientation a lieu si la CDAPH constate que les capacités de travail du travailleur handicapé ne lui permettent pas de travailler dans une entreprise ordinaire ou dans une entreprise adaptée ou pour le compte d’un centre de distribution de travail à domicile, ni d’exercer une activité professionnelle indépendante, momentanément ou durablement, à temps plein ou à temps partiel. Cette capacité de travail doit être inférieure au tiers de celle d’une personne valide.
Quel type de contrat signe le travailleur en Esat ?
Le travailleur handicapé signe avec l’Esat un contrat de soutien et d’aide par le travail, selon le modèle fixé par le décret n ° 20061752 du 23 décembre 2006. Ce contrat est conclu pour une durée d’un an, renouvelable chaque année par tacite reconduction. Il définit les droits et les obligations réciproques de l’établissement et de la personne handicapée, ainsi que le droit à une rémunération garantie versée dès l’admission en période d’essai du travailleur.
Quelle est la durée de travail hebdomadaire en Esat ?
En Esat, la durée de travail hebdomadaire est de 35 heures, conformément à l’article L.2121 du Code du travail, auquel renvoie l’article R.2435 du Code de l’action sociale et des familles issu du décret n ° 2006703 du 16 juin 2006. Conformément à ce même décret, l’Esat doit mentionner dans son règlement de fonctionnement le temps de travail de référence des travailleurs handicapés. Celuici peut être inférieur à la durée légale du temps de travail, mais en aucun cas supérieur. S’il établit un temps de travail de référence inférieur aux 35 heures légales, l’Esat doit indiquer que ce temps de travail est assimilé à un temps plein. La rémunération garantie correspond alors à celle d’un temps plein.
Quel est le montant de la rémunération minimum garantie ?
La rémunération garantie versée au travailleur handicapé est comprise entre 55 % et 110 % du Smic. Elle se compose d’une part financée par l’Esat et d’une part financée par l’Etat, qui alloue à l’établissement une « aide au poste ». Si le travailleur exerce une activité à temps partiel, le montant de la rémunération garantie est réduit proportionnellement. Celleci est versée dès l’admission en période d’essai, à condition qu’un contrat de soutien et d’aide par le travail ait été conclu. En cas de maladie, elle est maintenue intégralement au titre de l’assurance maladie.
En complément de cette rémunération garantie, l’Esat peut verser aux travailleurs une prime d’intéressement qui ne pourra pas dépasser 10 % du montant total annuel de la part de rémunération garantie financée par l’établissement. Cette prime n’est pas prise en compte dans le calcul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), ce qui garantit un revenu net réel pour le travailleur handicapé.
Le cumul de la rémunération garantie et de l’AAH estil possible ?
Le cumul de l’AAH et de la rémunération garantie est possible, à condition de ne pas excéder 100 % du Smic brut mensuel. Audelà, l’AAH est réduite en proportion. Ce taux est porté à 130 % pour les allocataires mariés (et non séparés), liés par un pacte civil de solidarité ou vivant en concubinage, et à 115 % pour ceux ayant un enfant ou un ascendant à charge.
Selon les modalités définies par le décret n ° 20061752 du 23 décembre 2006, lorsque le bénéficiaire de l’AAH est admis en Esat et bénéficie de la rémunération garantie, le montant de ses revenus d’activité à caractère professionnel est pris en compte pour le calcul de l’AAH, après application d’un abattement de 3,5 % lorsque le salaire direct financé par l’Esat est compris entre 5 et 10 % du Smic, de 4 % lorsqu’il est compris entre 10 et 15 % du Smic, de 4,5 % lorsqu’il est compris entre 15 et 20 % du Smic et, enfin, de 5 % lorsqu’il est compris entre 20 et 50 % du Smic.
Quelle est la durée de la période d’essai en Esat ?
Une période d’essai peut être prévue par la CDAPH dans sa décision d’orientation. Elle est d’une durée de six mois au plus, renouvelable une fois sur proposition de la direction de l’établissement. Elle doit permettre au travailleur handicapé de s’adapter aux activités proposées et d’être en mesure de donner le meilleur de ses capacités une fois qu’il aura été admis avec plein effet dans la structure productive. La période d’essai peut être interrompue de manière anticipée par la CDAPH à la demande de la personne handicapée ou de la direction de l’établissement, s’il s’avère que la personne handicapée n’est pas susceptible de tirer profit de son accueil en Esat.
Quels sont les droits aux congés des travailleurs en Esat ?
Si le droit aux congés existait dans la quasitotalité des CAT, la loi n ° 2005102 du 11 février 2005 a apporté des précisions permettant d’uniformiser des pratiques disparates. Le droit aux congés des travailleurs accueillis en Esat a été établi par le décret du 16 juin 2006 : le travailleur handicapé ayant conclu un contrat d’aide et de soutien par le travail et qui justifie d’un mois de présence dans la structure a droit à un congé annuel, qui donne lieu au versement de la rémunération garantie et dont la durée est déterminée sur la base de deux jours et demi ouvrables par mois d’accueil en Esat. La durée totale de ce congé, qui ne peut excéder trente jours ouvrables, peut être augmentée de trois jours mobiles, dont l’attribution est laissée à l’appréciation du directeur de la structure.
Par ailleurs, les travailleurs handicapés ont également droit, conformément aux conditions et modalités définies dans le Code du travail, aux congés de maternité, d’adoption, de paternité, parental d’éducation, de présence parentale, de solidarité familiale, ainsi qu’au congé accordé au père à la suite du décès de la mère qui attendait un enfant. Enfin, certains événements familiaux mariage, naissance, adoption ou décès peuvent ouvrir droit à des autorisations exceptionnelles.
Quels droits ont les travailleurs en matière formation ?
La loi du 11 février 2005 précise que les Esat doivent mettre en oeuvre ou favoriser l’accès des travailleurs à des actions d’entretien des connaissances, de maintien des acquis scolaires et de formation professionnelle, ainsi que des actions éducatives d’accès à l’autonomie et d’implication dans la vie sociale. Auparavant, les CAT étaient libres de prévoir ou non un plan de formation. Les Esat doivent, eux, présenter au directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, au plus tard le 30 avril de chaque année, un rapport sur leur politique en faveur des travailleurs handicapés comportant, entre autres, les éléments concernant la mise en oeuvre des actions de formation. La loi du 11 février 2005 a également affirmé le principe de la validation des acquis de l’expérience pour les travailleurs handicapés.
Le décret n ° 200626 du 9 janvier 2006 encadre la mise en oeuvre de la formation professionnelle des personnes handicapées. Les organismes de formation doivent ainsi prévoir un accueil à temps partiel ou discontinu, une durée adaptée de la formation et des modalités de validation. Ces adaptations sont mises en oeuvre sur la base des informations fournies notamment par la personne handicapée, le service public de l’emploi et la CDAPH.
Un travailleur en Esat peutil être mis à disposition en milieu ordinaire ?
La loi du 11 février 2005 a institué une faculté de mise à disposition provisoire dans une entreprise extérieure des personnes accueillies en Esat. Ainsi, lorsque l’exercice d’une activité à caractère professionnel en milieu ordinaire de travail est susceptible de favoriser l’épanouissement personnel et professionnel et de développer la capacité d’emploi de travailleurs handicapés admis dans un Esat, ce dernier peut mettre l’un ou plusieurs de ces travailleurs, avec leur accord, à la disposition d’une entreprise, d’une collectivité territoriale, d’un établissement public, d’une association ou de toute autre personne morale de droit public ou de droit privé. La mise à disposition est aussi possible auprès d’une personne physique.
Un contrat de détachement écrit est alors établi entre l’Esat et la structure dans laquelle le travailleur est mis à disposition. Une convention précisant l’aide apportée à ce dernier et à son employeur peut le compléter. Les travailleurs handicapés concernés continuent à bénéficier de l’accompagnement médicosocial et professionnel de l’Esat, auquel ils demeurent rattachés. La mise à disposition ne peut excéder deux ans qu’avec l’accord de la CDAPH et du directeur de l’Esat.
Un travailleur handicapé peut -il être sanctionné ?
Il est possible de suspendre un travailleur handicapé, voire de l’exclure. La direction d’un Esat peut prendre une mesure conservatoire d’une durée initiale d’un mois suspendant la présence du travailleur si celuici :
- met gravement en danger sa santé ou sa sécurité ;
- met gravement en danger la santé ou la sécurité des autres travailleurs ou du personnel de l’établissement ;
- porte gravement atteinte aux biens de l’établissement.
Immédiatement, la maison départementale des personnes handicapées doit être saisie de cette mesure par la direction de la structure. C’est la CDAPH qui décide du maintien ou non dans l’Esat du travailleur. Si ce dernier souhaite faire valoir ses droits devant la commission, il peut se faire assister d’un membre du personnel, d’un usager de l’Esat ou d’une personne qualifiée.
Repères :
Loi n°20022 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médicosociale