ESAT/Les établissements et services d'aide par le travail face à la contrainte budgétaire
En raison du caractère médico-social et non commercial des établissements, les personnes handicapées travaillant en ESAT relèvent d'un statut spécifique. Elles n'ont en effet pas le statut de salarié soumis au code du travail. Elles ne bénéficient donc pas d'un contrat de travail, à la différence des personnes qui travaillent dans une entreprise adaptée, mais signent avec l'ESAT un contrat de soutien et d'aide par le travai), conclu pour une durée d'un an et reconduit chaque année par tacite reconduction, qui énonce les droits et obligations des parties signataires et consacre la mise en oeuvre du projet de vie de la personne ainsi que du soutien médico-social et éducatif.
Le régime juridique des travailleurs d'ESAT est défini par le code de l'action sociale et des familles, qui fait référence pour certains de leurs droits à des dispositions du code de travail. La loi de 2005 a enrichi les droits fondamentaux des personnes handicapées en ESAT, en les élargissant notamment aux droits à la formation professionnelle et à la validation des acquis de l'expérience (VAE).
Les droits des travailleurs en ESAT Bien que soumis à un statut particulier, les personnes handicapées travaillant en ESAT n'en bénéficient pas moins de droits sociaux étendus, parmi lesquels : - Un droit à une rémunération garantie, dont le montant est compris entre 55 % et 110 % du SMIC brut. Par ailleurs, les travailleurs en ESAT peuvent recevoir, sous certaines conditions, une prime d'intéressement (cf. infra). - Une durée maximale du travail fixée à 35 heures. Cette durée intègre le temps consacré aux activités de soutien à l'activité professionnelle. Cependant, le temps global de présence en ESAT peut dépasser cette durée. - Le droit à congés : les personnes accueillies en ESAT peuvent bénéficier des principaux congés mentionnés dans le code du travail : congés annuels (2,5 jours ouvrables par mois d'accueil en ESAT), congés de maternité, congés parentaux, congés pour événements familiaux. - L'accès à la formation professionnelle et à la validation des acquis de l'expérience (VAE), avec des congés. Les travailleurs handicapés bénéficient du régime de droit commun de VAE, avec le cas échéant des aménagements d'épreuves liés à la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. Depuis le 1er janvier 2015, en vertu de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, toute personne accueillie dans un ESAT dispose d'un compte personnel de formation en remplacement de l'actuel droit individuel à la formation. - Un droit à la participation et à l'expression, qui s'exerce dans le cadre du conseil de la vie sociale (CVS). Le CVS permet notamment aux travailleurs handicapés de participer à l'élaboration et à la modification du projet d'établissement et du règlement de fonctionnement, et formule des avis et des propositions sur toute question intéressant le fonctionnement de l'établissement (organisation intérieure, vie quotidienne, activités, animation socioculturelle).
|
La question de l'alignement du statut des travailleurs en ESAT sur celui des salariés de droit commun est parfois soulevée. Cette question est suspendue aux conséquences que tirera la chambre sociale de la Cour de cassation de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 26 mars 2015 dans l'« affaire Fenoll » ). En effet, la Cour de cassation avait saisi la CJUE d'une question préjudicielle afin de déterminer si les personnes handicapées accueillies en ESAT devaient être considérées comme des travailleurs au sens de l'Union européenne, c'est-à-dire de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 et de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Dans ses conclusions rendues le 12 juin 2014, l'Avocat général près la CJUE avait suggéré à celle-ci de reconnaitre aux travailleurs en ESAT ce statut. Dans son arrêt précité, la CJUE s'est rangée à cette analyse, ce qui pourrait conduire à une remise en cause du statut exorbitant de droit commun des usagers d'ESAT.
Cependant, il n'en demeure pas moins que le statut spécifique des travailleurs en ESAT est justifié compte tenu de la forme particulière que prend l'organisation du travail au sein de ces établissements. Le rapprocher de celui des salariés de droit commun ne parait pas opportun, car cela risquerait de transformer les relations qui existent entre les travailleurs et leurs encadrants et qui sont basées avant tout sur l'échange et l'accompagnement. Par ailleurs, les droits sociaux reconnus aux travailleurs handicapés paraissent suffisamment étendus et garantis. Lors des visites effectuées par votre rapporteur spécial, celui-ci a pu constater qu'il existe un vrai besoin de représentation et d'expression des personnes handicapées en ESAT. Celui-ci a actuellement lieu au sein des conseils de la vie sociale (CVS). Renforcer ce droit d'expression et de participation, par exemple par l'élection de délégués du personnel, ne parait cependant pas présenter d'intérêt particulier compte tenu de la lourdeur du processus.
* 7 Le code de l'action sociale et des familles contient, à l'article annexe 3-9, un modèle de contrat de soutien et d'aide par le travail à disposition des ESAT.
* 8 CJUE, arrêt du 26 mars 2015, affaire C-316/13, Gérard Fenoll c/ Centre d'aide par le travail La Jouvene, Association de parents et d'amis de personnes handicapées mentales (APEI).