Dans les établissements et services d’aide par le travail, seuls les ateliers essentiels au bon fonctionnement de la société, comme les blanchisseries industrielles qui lavent notamment les draps des hôpitaux, continuent à tourner. Souvent même sans plus aucun travailleur handicapé, par mesure de précaution.
Ils étaient 120 000. Ils ne sont plus que quelques centaines. Voire moins. En quelques jours, les 1 400 établissements et services d’aide par le travail (Ésat) se sont vidés de leurs usagers. Dès la fin de la semaine dernière, le secrétariat d’État chargé des personnes handicapées avait appelé les Ésat à « organiser la réduction de leurs activités au strict minimum ».
« Seuls des ateliers stratégiques continuent à fonctionner, précise Didier Rambeaux, le président d’Andicat, l’association nationale des directeurs et cadres d’Ésat. C’est le cas, notamment, des blanchisseries industrielles qui lavent les draps des hôpitaux, des maisons de retraite, etc. »
« Mettre nos usagers en sécurité. »
« Ou des prestations de nettoyage dans des établissements médico-sociaux où vivent des résidents handicapés, ajoute Pierre-Yves Lenen, directeur du développement et de l’offre de services à APF France handicap, qui gère 25 Ésat. Par contre, nous n’assurons plus l’entretien dans les lieux où ce n’est pas absolument nécessaire, comme les mairies. Nous avons réduit la voilure au strict minimum. Ce qui a primé, c’est de mettre nos usagers en sécurité. »
Du renfort dans les blanchisseries
L’Unapei, qui gère près de la moitié des Ésat, n’a maintenu, elle aussi, que des activités indispensables à la bonne marche de la société française. « Mais depuis jeudi 19 mars, par mesure de précaution, plus aucun usager handicapé n’est au travail, précise Patrick Maincent, son vice-président. Ce sont les moniteurs, les éducateurs et autres salariés qui font tourner les blanchisseries, les ateliers de conditionnement de produits pharmaceutiques et de gel hydroalcoolique… Nous avons aussi appelé en renfort des agents de service, qui travaillaient dans les établissements ayant fermé leurs portes comme les instituts médico-éducatifs (IME). »
Pas d’impact financier pour les travailleurs d’Ésat
« La cessation d’activité n’aura pas d’impact financier pour nos usagers », tient à rassurer Didier Rambeaux. Ils vont continuer à toucher leur rémunération garantie. En 2018, elle était, en moyenne, égale à 61 % du Smic. Et ils percevront en plus, s’ils y avaient déjà droit, leur AAH différentielle. « Nous attendons juste la confirmation officielle que l’État va bien nous verser l’aide au poste, poursuit-il. Elle représente un demi Smic, soit la plus grande part de la rémunération garantie. J’imagine mal que les pouvoirs publics suspendent leur aide dans le contexte actuel. »
Le reste de la rémunération garantie – 10 % en moyenne – est financée par l’activité commerciale. Là serait plutôt le maillon faible si le confinement était appelé à perdurer.
Actualisation du 24 mars 2020 : Dans un communiqué publié dans la soirée du lundi 23 mars, le gouvernement précise que le revenu des travailleurs d’Ésat « sera totalement préservé pendant la crise ». « Les Ésat continueront de verser aux travailleurs handicapés privés d’activité, et n’entrant pas dans les catégories de personnes à risques de complications sévères pouvant bénéficier d’un arrêt de travail indemnisé, la part de rémunération directe qu’ils assuraient jusqu’alors. En contrepartie, (…) la part de la rémunération des travailleurs que les Ésat assument directement sera prise en charge par l’État pour les personnes handicapées dont l’activité est suspendue ». Le gouvernement garantit également aux établissements « le maintien de l’intégralité de leurs dotations et aides aux postes pendant toute la période ».
Changement de stratégie
Au début de la crise, certaines associations avaient envisagé de maintenir aussi longtemps que possible leurs activités. Objectif : éviter la surchauffe dans les foyers de vie où les travailleurs se seraient retrouvés confinés 24 heures sur 24. Mais le développement de l’épidémie a vite rendu cette stratégie caduque. Tout comme la difficulté à faire respecter les mesures barrières.
« Assurer le suivi des usagers. »
« Aujourd’hui, la priorité, c’est d’assurer le suivi de nos usagers. Car 30 % seulement vivent en foyer, souligne Didier Rambeaux. Nos salariés les appellent donc régulièrement pour voir si tout va bien ou leur expliquer comment utiliser la dérogation de sortie s’ils doivent faire leurs courses. »
Par ailleurs, les moniteurs d’ateliers, éducateurs et autres professionnels sont tenus de rester disponibles. Ils peuvent être mobilisés à tout moment pour prêter main forte dans les autres établissements médico-sociaux. L’heure est à l’adaptation permanente.
sources Handicap.fr