Pourquoi il est très difficile de travailler avec un trouble bipolaire ?
Non, le bipolaire n’est pas un feignant, non ce n’est pas son souhait de ne pas travailler !!! D’ailleurs, généralement, quand il peut travailler, il travaille ( trop même ) ! En dehors des phases dépressives sévères la plupart du temps . Anecdotiquement, les études semblent poser moins de problèmes, peut-être que c’est dû au laxisme des absences possibles …
Travailler pendant plus d’un mois peut relever de l’exploit, suivant notamment la réaction du cerveau à son nouvel environnement professionnel . Un travail qui n’est pas plaisant, cela pourrait déclencher une crise sur le long terme .
Le bipolaire souffre parfois de symptômes antisociaux : le bruit, le travail en équipe, l’impact de l’image de soi, etc etc … Difficile de travailler dans ces conditions-là ! La motivation manque, le réveil est compliqué jour après jour …
En plein travail, la peur au ventre, la panique peut très vite s’installer pour x raisons . Après toute crise de panique, devant les collègues, la honte s’empare alors du mental du bipolaire, vulnérable, encore plus fragilisé qu’en temps normal … Comment retourner au travail après de telles situations ( effrayantes ) ? Après l’abandon de l’emploi ou la rupture du contrat par la société, il faut de nouveau en retrouver un nouveau job, jusqu’à la prochaine crise, c’est un cercle vicieux …
Quand on est une personne sans trouble mental, on peut ne pas comprendre cette réaction de tout quitter pour des choses qu’on ne vit pas …
Gérer un trouble bipolaire est déjà un emploi à plein temps, 24h/24 7j/7, seul . Les symptômes ne sont pas présents pendant seulement 7H et vous les donnez ensuite à quelqu’un d’autre ( ce serait trop beau ) !!! Il ne faut pas oublier que cette maladie peut avoir des conséquences mortelles si elle est mal gérée ( suicide ) … C’est épuisant . Faire le deuil de sa carrière professionnelle est très dur à vivre, c’est d’ailleurs une des raisons pour laquelle beaucoup de patients ne demandent pas tout de suite une pension d’invalidité . Cette dernière fait peur, elle annonce la fin d’une vie normale et rappelle encore plus cette maladie mentale …
Avant de juger une personne qui est bipolaire et sans emploi, il faut plutôt essayer de comprendre sa maladie et son rythme de vie autour de cette dernière … Il existe bien évidemment des centaines de raisons propres à chacun, mais en voici une dizaine qui reviennent souvent …
Suivant le type de bipolarité, les durées des cycles notamment, maintenir une stabilité et rester dans la constance, rester toujours pareil et opérationnel est très compliqué . Les patients ayant une période euthymique ( stable ) durant plusieurs mois ne sont pas si nombreux que cela . Pour vous donner un petit aperçu, on parle de trouble bipolaire à cycles lents pour ceux qui ont des périodes d’humeur normales pendant 3 mois seulement … Autant vous dire que les bipolaires à cycles rapides n’ont pas beaucoup de « repos » … Alors, comment garder un emploi quand on est en dépression majeure ou que l’on traverse une crise maniaque ???
L’anxiété est un trouble quasi-permanent chez le bipolaire, c’est pourquoi il est important de réduire au maximum les facteurs stressants comme celui de l’inconnu . Pour pouvoir gérer son anxiété et/ou réagir face à une crise d’angoisse, la personne a besoin de se sentir « comme chez elle » et se sentir entourée de gens qu’elle connaît, des personnes de confiance . Être en sécurité mentalement et physiquement est primordial pour elle .
La bipolarité est une maladie invisible à première vue, mais elle est aussi imprévisible pour la personne qui en souffre et son entourage . Comment peut-elle prévoir d’aller travailler quand elle ne sait pas de quel symptôme elle va souffrir le lendemain ? Les hauts et les bas sont le lot quotidien du bipolaire, des jours où il sera super bien, des jours moyennement et des jours qui seront catastrophiques …
Si une personne est diagnostiquée bipolaire, normalement elle a un traitement médicamenteux, voilà une contrainte de plus à gérer, enfin surtout celle des effets secondaires indésirables … La fatigue et les tremblements sont les plus fréquents, mais il y en a d’autres, et souvent bien plus difficiles à masquer au travail . Une personne bipolaire a vraiment besoin de plus de repos qu’une personne en bonne santé, alors si elle ne peut pas faire une petite sieste en cours de journée, comment faire pour être polyvalente tout au long de la journée à son poste ? Prendre encore plus de médicaments ? Non, ce n’est absolument pas une bonne solution sur le long terme … D’ailleurs, suivant le traitement prescrit par le psychiatre, le patient peut être dans l’interdiction de conduire, ce qui est déjà très restrictif pour trouver un travail dans certaines villes …
C’est environ 30% des personnes bipolaires qui seraient aussi touchées par le trouble panique . Ce trouble connexe à la bipolarité, bien plus fort qu’un simple symptôme, peut bloquer littéralement une personne chez elle, aussi intense qu’une phobie sociale … Se dire qu’il faut aller à la rencontre du monde ( du public ) peut sembler être une horreur ! En général, cela ne dure que quelques heures, mais est-ce qu’un patron accepterait des retards courants pour ce type de motif ? Si oui, pas très longtemps …
Le trouble bipolaire est composé essentiellement de troubles du comportement et de troubles de l’humeur . Comment peut-on faire confiance à 100% à une personne qui souffre de troubles tels que la concentration, la mémoire, le jugement, etc etc … ? Et vice-versa, comment une personne bipolaire peut affirmer qu’elle est de confiance alors qu’elle connaît ( normalement ) ses symptômes ? En synergologie, c’est ce qu’on appelle un mensonge de sur-valorisation, ce n’est pas grave en fait car tout le monde le fait ( au moins à l’entretien d’embauche ), mais quand c’est régulier, est-ce honnête envers sa hiérarchie ? Non, ça peut même être dangereux pour les 2 parties : employeur et salarié ( accident, perte de client important, etc etc … ) .
Quand on est au travail, ce n’est pas pour s’amuser en général, un rythme de travail est donné par ses supérieurs et cette cadence est à respecter, malade ou pas ! C’est là un gros facteur de stress pour le bipolaire, car oui, en phase maniaque il lui est facile de manager plusieurs personnes ou effectuer plusieurs actions en même temps, mais cela ne dure pas éternellement et a un impact néfaste sur sa santé … Les semaines qui suivent sont alors désastreuses car il lui faut un temps égal de récupération, chose impossible avec un patron . Le rythme d’activité doit toujours être égal .
C’est un peu différent des troubles alimentaires et cela se rapproche même de l’angoisse . La personne bipolaire a ses habitudes et ce n’est pas bon de les changer, cause de frustration, alors si pendant la pause déjeuner elle n’est pas avec une personne qu’elle apprécie, elle pourra avoir l’appé !@#$%^&* coupé ! Stress, panique, difficile à expliquer, mais le bipolaire risque de ne pas manger normalement en présence de facteurs d’alerte ( l’image de soi peut-être ? ) .
Les rendez-vous avec le psychiatre sont très importants pour maintenir la bonne santé mentale du patient et ainsi prévenir d’une rechute . Certes, les heures de consultation peuvent être en dehors des horaires de travail, mais on rajoute alors une activité supplémentaire et donc de la fatigue, du stress … Beaucoup le font, mais un jour ou l’autre, bien souvent, ils craquent : burn-out dû au rythme de vie qui est en général sans repos suffisant …
Docteur Langsman intervenant